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Les francs-maçons, entre fantaisie et réalité

Sectaire, manipulatrice, élitiste, la franc-maçonnerie est souvent connotée négativement. Mystérieuse, elle éveille de nombreux soupçons. Afin de mieux comprendre et appréhender cette communauté, de démêler fantaisie et réalité, j’ai décidé d’interroger, Jean-Pierre, une connaissance qui m’a récemment dévoilé son appartenance à ce groupe.

Tout d’abord, qu’est-ce que la franc-maçonnerie ? Une “association de rencontres et de réflexion” selon le Grand Orient de France, la franc-maçonnerie comporte différentes obédiences et Le Grand Orient en est la plus ancienne et la plus importante d’Europe. Ce dernier apparaît au début du XVIIIème siècle, ses pratiques et idéologies sont répertoriées dans Les Constitutions d’Anderson qui en représentent les textes fondateurs. Il est composé de différentes loges, plus de mille-deux-cents et compte plus de cinquante-mille membres inscrits aujourd’hui.


La Franc-Maçonnerie, « une association laïque, un club philosophique, sans doctrine et sans religion ».


Jean-Pierre, franc-maçon depuis six ans, ayant accédé au grade de ‘’maître’’, me décrit quant à lui la franc-maçonnerie comme « une association laïque, un club philosophique, sans doctrine et sans religion ». Il insiste sur le terme de laïcité. En effet, si la franc- maçonnerie accepte bien toutes les religions, c’est à la seule condition que celles-ci soient bien séparées de toute idée de gouvernance ou de supériorité. Le sujet de la religion peut être évoqué, mais l’association en elle-même n’appartient à aucune religion. Si les Constitutions d’Anderson évoquent un Dieu tel un Grand Architecte, tendant plutôt vers le panthéisme, il n’y a pas de modèle religieux particulier imposé pour être franc-maçon. Jean-Pierre évoque ensuite la philosophie, notion très importante en Franc-Maçonnerie. Pour lui, les échanges entre francs-maçons sont « des réflexions construites par la discussion, loin de la discussion de comptoir où l’opinion devient théorie ». Il assure qu’il y a « beaucoup d’écoute, beaucoup de respect », le vénérable est chargé d’accorder la parole à chacun et de permettre le bon déroulement de la discussion, personne ne se coupe la parole. Pour Jean-Pierre, ce qui caractérise les réunions de francs-maçons, c’est un échange « alimenté » par tous les membres, la discussion se fait par l’intervention de chacun, contrairement aux discussions courantes du quotidien qui ressemblent plus à des superpositions d’idées sans que personne ne s’écoute réellement. Aussi, on ne peut juger un membre sur ce qu’il peut dire. Être franc-maçon c’est accepter et respecter les divergences d’opinion.


La Franc-Maçonnerie, organisation secrète et fantaisiste ?


Toutefois, si la franc-maçonnerie est laïque et philosophique, elle reste aussi très mystérieuse. Un franc-maçon peut révéler à qui il veut qu’il appartient à la Franc-Maçonnerie mais il ne peut révéler l’identité des autres membres à leur place. De plus, la plupart préfèrent garder secrète leur appartenance à cette association, particulièrement les premières années d’intégration. Jean-Pierre dit qu’être franc-maçon c’est disposer d’une « parole libre dans un endroit sacré et rien ne sort de cet endroit ». Si cela peut être rassurant pour les membres, ça peut aussi être considéré comme suspicieux pour les personnes extérieures. Quand je demande à Jean-Pierre ce qu’il pense des accusations sectaires envers les francs-maçons, il me répond qu’une secte se caractérise par une doctrine et une religion, or il affirme que « la Franc-Maçonnerie n’a ni doctrine ni religion ». Pour lui, la Franc-Maçonnerie est « de moins en moins secrète, de plus en plus discrète », et cette discrétion relèverait plus d’une question de tradition, héritée des exilés britanniques, premiers francs-maçons sur le territoire français. Ces accusations remontent également, pour certaines, à l’époque des régimes dictatoriaux. Jean-Pierre me confie que la Franc- Maçonnerie aurait « toujours été condamnée car apolitique ». Il mentionne notamment le nazisme, le communisme, le régime de Franco qui auraient interdit l’appartenance à la Franc-Maçonnerie, groupe philosophique menaçant l’établissement et le maintien de régimes autoritaires.

Par ailleurs, le rituel fantaisiste est souvent l’objet de moqueries et d’incompréhension. Jean- Pierre qui a été convaincu, par une amie, de rejoindre la franc-maçonnerie, me confie avoir été surpris au début et l’être parfois encore. Il compare ce rituel à une messe, sans le caractère religieux évidemment. Il dit ainsi, « ça me surprend tout le temps, mais c’est ça l’intérêt, un franc-maçon doit toujours avoir le doute, le doute c’est le propre de la réflexion. « Quand il n’y a plus de doute, ça devient une religion ». Alors, s’il reste surpris face à cette tradition, à ces règles qui peuvent parfois paraître absurdes, à ces symboles étonnants, à ces statuts (vénérable, grand orateur, maître de cérémonie, tuileur, grand expert) et à cette montée en grade (allant d’apprentis, aux compagnons, jusqu’aux maîtres), Jean-Pierre assure que « le doute fait partie de la progression » et permet à « chaque individu de s’achever en toute liberté de conscience ». Il ajoute que le rituel est présent partout dans la vie d’un homme, du passage du bac, au mariage, aux anniversaires. Pour lui, « tout est rituel, l’humanité est construite sur des rituels ». Par ailleurs, ce rituel est partagé par tous les membres, il permet d’instaurer du respect, de l’ordre mais surtout une forme de solidarité, les francs-maçons ont conscience de leur appartenance commune à un groupe et tendent tous vers le même idéal, l’humanisme.


La Franc Maçonnerie, élitiste et conformiste ?


Néanmoins, une autre critique est faite à la Franc-Maçonnerie, l’élitisme. Certains dénoncent des membres au service d’eux-mêmes, utilitaristes, qui s'assureraient simplement une carrière et une position sociale, loin de l’idéal purement humaniste. A ceci, Jean-Pierre me répond que la Franc-Maçonnerie est justement un vecteur d’ouverture sociale. Dans sa loge, il côtoie un garde forestier, un chirurgien, un architecte, un cuisinier, des salariés, des fonctionnaires, des paysans, « un panel assez complet finalement », pour reprendre ses mots. Quant à l’idée courante selon laquelle la Franc-Maçonnerie serait une organisation réservée aux hommes, Jean-Pierre m’apprend que certaines loges sont mixtes quand d’autres sont réservées aux femmes ou aux hommes. Les francs-maçons ont également le droit de visiter d’autres loges et même si celle de Jean-Pierre est réservée aux hommes, il arrive souvent que celle-ci reçoive la visite de femmes francs-maçonnes.


Finalement, la Franc-Maçonnerie ne serait ni plus ni moins qu’un groupe philosophique, humaniste, tendant vers le progrès, loin de correspondre à ce statut de secte, de communauté manipulatrice dont beaucoup l’accusent. Dans tous les cas, la Franc- Maçonnerie ne semble pas représenter un danger pour la société. Jean-Pierre le rappelle, la Franc-Maçonnerie est surtout caractérisée par la notion de liberté et un franc-maçon peut décider, quand il le souhaite, de sortir de l’organisation.


Théa

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